« Derrière les fenêtres du temps »

Derrière les fenêtres du temps il y a comme un mystère de fleurs au fond de tes yeux, une douce interrogation, une sensation étrange, nuages de Debussy et reflets de Monet dans l’écho de ta voix. Sur quelle barque blonde vogues-tu, réapparais-tu au détour d’un horizon de feu ? Sur quelle rime de vent toutes ces années-lumière ont dessiné ton nom ? Des souvenirs bousculent ma vie et renvoient le hasard au placard de l’ennui. Le silence épouse les contours de la nuit et me réveille quand la lune a embaumé la mer. Pourquoi es-tu cette inconnue au cœur de la nuit, au cœur de mes mots-silences, de mes paysages, de mes ciels marins tourmentés et pourtant si calmes si clairs si lisses, sillages des aubes aimées…

Derrière les fenêtres du temps il y a des années-mémoires au parfum oriental de ta vie entrevue, comme un geste imprévu qui fragilise les vagues, larmes des océans. Sur quels chemins de terre iras-tu découvrir l’Inconnu que la brise interpelle ? Sur quelles rives insolites iras-tu accoster un jour ou une nuit dans un sourire si clair ?

Derrière les fenêtres du temps qui s’entrouvrent parfois, il y a ton visage éclairé de paupières mouillées de chagrins éphémères et sensibles et soudains ; des musiques d’ Italie qui rient de ma jeunesse et de mes insouciances, fragilité-cadeau des sentiers de l’enfance qui sont restés ancrés au seuil de ma conscience comme un refrain banal qu’on redécouvre enfin, comme un livre qu’on ouvre sur une page mauve, comme un regard qui brille maquillé de soleil.

Derrière les fenêtres du temps il y a des photos que je me plais à voir, à regarder longtemps comme on brûle une vie dans les rides des yeux esquissés de sourires. Il y a de grands vents, des odeurs nouvelles et pourtant éternelles qui déchirent les matins à cette heure où la nuit hésite à tutoyer le jour.

Derrière les fenêtres du temps, il y a la valeur des personnes aimées et que l’on n’oublie pas, des secondes infinies, des années sans paroles, les chemins de l’école qui rattrapent mes pas ; et la danse du temps boléro sans rival qui s’amuse à jouer avec les sentiments. Comme un pastel rageur j’éclate de couleurs les vides de mes nuits guidé par des sources d’aquarelles sur des neiges bleutées féminines et félines, des champs de blé mouillés, des iris qui penchent dans le noir de Van Gogh et des marées montantes émerveillées d’espoirs.

Derrière les fenêtres du temps il y a le désespoir aussi. De n’être devenu que la virgule d’une phrase, la route vers nulle part, et l’impasse imbécile où se blessent les mains.

Derrière les fenêtres du temps il y a un pays qui chante dans ma tête et des pluies d’estampes japonaises drapées de brumes et de mélèzes, des pluies vertes et verticales sur des chemins à s’évader ; des parfums de sous-bois apothéoses d’automne, silences, solitudes.

Derrière les fenêtres du temps, il y a une barque balancée doucement lentement sous le soleil du sud, écrasant de lumière les aubes ou les couchants, accentuant les ombres et les rouges des murs, désespérés de vides et de reflets violents.

Derrière les fenêtres du temps il y a un littoral magique, où la folie des vents mêle à la crête des vagues les tempêtes d’hiver et des sourires d’enfants ; éclats de rires, écumes de goélands portés bien haut dans les nuages maritimes, ailes ruisselantes d’espaces imaginaires à inventer à dévorer à parcourir à s’imprégner à partager. Là où la mer touche le sable dans une caresse ineffable mes yeux se posent et inlassables m’emportent au fil de ma mémoire en dessinant des arabesques de buées, éclats de l’eau, averses à boire où vont se reposer les bateaux. La mer est là comme une amante imprévisible douceur de peau évanescente, frissonnante sur les roches nues. Mes pas s’y posent sans faillir, au creux des algues amassées ; et je m’habille de ressacs, d’éclaboussures érotico maritimes, volupté, cris d’oiseaux, diaphanes grisailles, orgues de cathédrales marines, traînées de ciels empourprés, matins soleil posés sur l’eau, lumière étrange et apaisante, gouttes de pluie salées de larmes, jaillissements de poissons clairs, risées sauvages et délirantes, incertitude des transparences, clarté des soirs humides et tendres. Et la vie renaît de ses cendres.

Derrière les fenêtres du temps il y a des nuits de violoncelle où la musique et le réel sculptent les esclaves de Michel-Ange.

Derrière les fenêtres du temps, il y a mes vieux rêves d’autrefois, douleurs d’adolescence perdue dont les plaies saignent parfois, pluie violente et infernale, qui détache les feuilles et mutile les grappes, entretient la mélancolie du moment, se ferme au dialogue mais s’épanche en paroles d’averses. Mes vieux rêves sont partis dans des mondes imaginaires, ont dévoré ma vie, m’ont rendu immobile, ont statufié mes craintes et mes déchirements. Ils ont tari les fontaines invisibles où s’abreuvaient tous mes oiseaux.

ET POURTANT

Derrière les fenêtres du temps il y a des gens que l’on découvre quelquefois, qui donnent couleur nouvelle aux choses que l’on ne voyait pas.

Comme une éclaircie nimbée de velours

Comme un rai de lumière de lumière éclaboussé d’été

Comme le bleu des volets sous le soleil de Grèce

Comme un miroir sans tain qu’on pourrait traverser

Comme l’herbe mouillée qui frissonne sous mes pas

Comme un bouquet de fleurs qui ne fanerait pas

Comme un lac de montagne où se mirent les arbres

Comme le ciel de Provence maquillé d’outremer

Comme l’odeur des garrigues quand la pluie s’est offerte

Et comme toi t’en souviens-tu qui fis aimer la vie et sus te faire aimer…

JE NE SAIS OU JE VAIS
MAIS QU’IMPORTE J’IRAI
RETROUVER LES CHEMINS
DE MES RÊVES D’ENFANT…………………………………………………

DERRIERE LES FENÊTRES DU TEMPS.


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